Entretien réalisé par Jérôme Provençal, journaliste indépendant
Le label Vicious Circle – basé à Bordeaux – a été créé en 1993 et le magasin de disques du même nom – implanté à Toulouse – a ouvert en 1997. Comment fonctionnent-ils l’un par rapport à l’autre et comment vont-ils ?
Philippe Couderc – Le magasin et le label sont autonomes mais intimement liés, ce qui constitue une force d’un point de vue économique. Les revenus d’un label dépendent des sorties et sont forcément irréguliers. Avec Vicious Circle, nous avons en moyenne six ou sept sorties par an et notre trésorerie fluctue beaucoup. Celle d’un magasin de disque est nettement plus stable, d’une année sur l’autre, à quelques petites variations près. Nous avons aussi développé des activités de pressage et de sérigraphie pour soutenir le label et le magasin. Tout cela constitue la « maison » Vicious Circle et elle marche bien en ce moment. Qu’il s’agisse du label ou du magasin, nous avons maintenu notre attachement à l’objet disque, vinyle ou CD, et cette fidélité paie. Quand on est indépendant, il faut avant tout croire à ce qu’on fait et tendre vers la plus grande qualité possible.
Éric Thély – Nous avons déménagé le magasin il y a trois ans en récupérant le local occupé auparavant par Harmonia Mundi, rue Gambetta, en plein centre de Toulouse. Après des débuts un peu difficiles, en raison notamment de travaux dans la rue, la situation s’est améliorée et les ventes ont bien augmenté. Je pense que cette embellie résulte avant tout du déménagement mais aussi de la remontée des ventes de vinyle – en espérant qu’il ne s’agit pas d’une mode passagère. Globalement, notre bilan actuel est positif. En tout cas, nous pouvons envisager un avenir. Dans l’ancien local, nous ne vendions pas assez et nous n’avions plus de perspective de développement. Depuis la réouverture du magasin le 11 mai, après le confinement, nous constatons avec plaisir que la clientèle est très présente. Je reste donc optimiste.
Que vous inspire la situation des disquaires indépendants en France ?
P. C. – A mes yeux, les disquaires indépendants sont des commerces culturels de proximité. Ils jouent un rôle de passeurs avec leurs clients et ils contribuent à la dynamique d’une ville. Ils permettent aussi de lutter contre la standardisation des villes, dans lesquelles se retrouvent toutes les mêmes grandes chaînes de magasins. Pour ces diverses raisons, ils devraient être davantage aidés par les pouvoirs publics, afin notamment de faciliter leur installation en centre-ville.